
Butembo, 11 septembre 2025 – Une vive tension règne dans la ville de Butembo (Nord-Kivu) ce jeudi matin, alors qu’une journée de solidarité et de protestation contre les massacres récurrents dans les territoires de Beni, Lubero et en Ituri a dégénéré en affrontements entre manifestants et forces de l’ordre.
Selon des témoins sur place, les échauffourées ont débuté aux alentours de 10h45, principalement dans les quartiers de Furu et Mutsanga, deux zones sensibles de la ville. La police aurait fait usage de tirs à balle réelle pour disperser les manifestants, qui répondaient par des jets de pierres et l’érection de barricades sur plusieurs artères principales.
Une ville à l’arrêt

À l’appel des mouvements citoyens, des organisations de la société civile et de certains leaders religieux, la population a observé une journée ville morte pour dénoncer ce que les organisateurs qualifient de « génocide silencieux » à l’est de la RDC. À Butembo, cette mobilisation s’est traduite par une fermeture quasi-totale des commerces, écoles, marchés et banques. Les transports en commun sont également à l’arrêt, et des pneus enflammés ont été signalés sur plusieurs axes routiers.
« Nous ne pouvons plus rester silencieux alors que nos frères et sœurs sont tués chaque jour à Beni, Lubero et en Ituri. Ce n’est plus un simple conflit, c’est un génocide », a déclaré un membre du mouvement Vérité pour l’Est, l’un des groupes organisateurs de la journée.
Répression policière dénoncée

La riposte des forces de l’ordre est vivement critiquée par des organisations locales de défense des droits humains. « L’usage de balles réelles contre des manifestants non armés est une violation grave des droits fondamentaux. Les autorités doivent cesser de réprimer la douleur d’un peuple en deuil », a réagi un avocat de la société civile.
Aucune victime n’a encore été officiellement confirmée, mais plusieurs blessés auraient été enregistrés, selon des sources hospitalières contactées en début d’après-midi. La situation reste tendue et évolutive, avec des détonations encore audibles dans certains quartiers à midi.
Un cri d’alarme à la communauté internationale

Cette mobilisation s’inscrit dans une série d’initiatives citoyennes destinées à alerter l’opinion nationale et internationale sur l’ampleur des violences dans l’est de la RDC. Depuis plusieurs années, les provinces de l’Ituri, du Nord-Kivu et du Sud-Kivu sont en proie à des attaques répétées de groupes armés, causant des milliers de morts et de déplacés.
« Si la communauté internationale ne se mobilise pas pour nous, nous continuerons à faire entendre notre voix, même au prix de notre sang », a lancé un manifestant, le visage couvert par un foulard.
Appel au calme
En fin de matinée, l’administration locale a appelé au calme, exhortant les organisateurs à privilégier le dialogue. Mais les manifestants, visiblement déterminés, réclament des mesures concrètes : sécurisation des zones touchées, justice pour les victimes et retrait immédiat des groupes armés.
La ville de Butembo, en état de paralysie totale, attend désormais la suite des événements, dans une atmosphère mêlée de colère, de douleur et d’espoir que la voix des sans-voix finisse par être entendue.
Roméo Patient Lokana
